• Jour 6 : La pause

    Pas de trajet aujourd'hui, donc, puisque je reste à Pescara pour un jour supplémentaire. Nous partons nous promener dans un parc un peu sauvage proche des montagnes. Je suis toujours avec Pier-Luigi et Pamela, mais Carmen n'est pas venue. Par contre, un certain Francesco nous accompagne, un ami de Pier-Luigi. Le parc est charmant, notamment avec son magnifique étang turquoise et ses petits chemins forestiers. Une fois de plus, pas d'appareil photo, dommage.

    Nous buvons une bière que Francesco a achetée juste avant la petite balade. En Italie, les bières sont vendues en bouteilles de 66cl, c'est la capacité standard. Du coup, une bière pour quatre, sachant qu'il doit être environ 17h, ça suffit, ça fait un verre chacun.

    Nous réfléchissons à la soirée qui nous attend. Un barbecue, ici-même, dans ce parc ? Bonne idée, mais la pluie a été annoncée pour ce soir. Pier-Luigi veut tenter, les autres sont sceptiques. Finalement, l'argument qui effacera l'idée est celui de la lumière : le parc n'est pas éclairé pendant la nuit. Nous partons boire un coup en terrasse, il y a un babyfoot. Ils veulent jouer, j'annonce que je ne sais absolument pas manier cette chose, puis j'en fais la démonstration ; pauvre Pier-Luigi qui me traîne comme coéquipier ! La partie est un massacre.

    Nous nous rasseyons, reparlons de la soirée. Après quelques idées peu convaincantes, Pier-Luigi se souvient soudainement qu'une soirée a lieu dans une maison d'amis, à une petite demi-heure de voiture. Rayonnant, il annonce que l'on pourra même faire notre barbecue là-bas : il veut absolument que je mange de l'arrosticini, une spécialité locale.

    L'arrosticini, c'est du mouton castré en brochettes. Et c'est vrai que c'est très bon... Par contre, je ne sais toujours pas en quoi c'est une spécialité locale : ne castre-t-on les moutons que dans le centre de l'Italie ? Il doit y avoir une autre subtilité. Bref, ce n'est pas le plus intéressant de la soirée, car l'endroit où nous nous trouvons est assez particulier. C'est une maison d'artistes. Ils sont quelques-uns à vivre ici, quelques autres à venir régulièrement, sculpteurs, musiciens, peintres... Ce soir, c'est un rassemblement, alors une quarantaine de personnes est venue manger les pizzas du four à bois qu'ils ont fabriqué. Je parle à quelques personnes et j'ai la mauvaise surprise de les trouver un peu fermés ; je comprends ensuite que le problème est celui de la langue : ils connaissent peu l'anglais. Je trouve quand même des gens sympa. Un saxophoniste bourré qui vit de sa musique en Allemagne, un Argentin avec qui je discute de mes projets de WWOOFING (http://fr.wikipedia.org/wiki/WWOOF) en Amérique latine.

    A un moment, j'entends de la musique à l'intérieur. Je m'y dirige, intrigué. Et je fais la découverte de la soirée : une salle remplie d'instruments de musique et des accessoires qui vont avec. Tu arrives, tu prends ce que tu veux, tu joues. Djembé et percussions diverses, harmonica, basse, guitare, batterie, piano, tu choisis. Tout est branché à une table de mixage, il y a les amplis, les micros, tout. Et ils jouent, ils sont 7 ou 8, et je regarde et j'écoute. Qu'est-ce qu'ils sont bons ! Je suis particulièrement impressionné par le pianiste, non pas pour son niveau (il est très bon, mais les autres aussi), mais pour son attitude. Il joue avec le visage en extase, un grand sourire d'enfant, les yeux fixant le clavier comme si chaque note qu'il en sortait était un nouveau cadeau, un nouveau miracle. Ce type m'émeut. Entre alors une fille qu'il connaît, il veut la saluer tout en jouant, lui faire un petit sourire, mais il se rend compte qu'il ne peut pas, il est déjà au maximum. On voit sur son visage qu'il cherche, innocent, puis se contente d'un petit geste de main, les yeux pétillants, semblant s'excuser de ne pas faire plus, et il continue de s'éclater. Ce type m'émeut vraiment et, l'alcool aidant, je sens même que les larmes ne sont pas loin. Je passe un bon moment à le regarder jouer.

    Plus tard, les larmes sortiront vraiment, mais de rire, cette fois. Un ami de Pier-Luigi nommé Francesco (pas le même que le Francesco d'avant) m'a été présenté comme étant "toujours le même qu'à ses 15 ans". Il en a plus de 30. Intrigant. Je suis toujours en train d'écouter les musiciens lorsque Francesco décide de danser. Et là, je comprends ce qu'on m'a dit précédemment. Le voilà qui, au milieu des musiciens, se met à enchaîner des poses aux allures de caricatures de dieux grecs, comme s'il était la muse d'un peintre ou la cible d'un photographe, ajoutant parfois sa touche personnelle avec une main sur l'entre-jambe ou un déhanché à quelques centimètres du visage d'une spectatrice bien placée. Soudainement, il s'écroule par-terre en guise de figure de breakdance, frôlant au passage de son pied la tête du type jouant de l'harmonica. Le tout avec un visage totalement sérieux. Tout le monde est mort de rire, moi le premier.

    En fin de soirée, je plante ma tente derrière la maison, parmi d'autres.

     

    Jour 7 : A moi le sud !

    Réveil vers 11h. Nous aidons un peu au rangement puis partons. Petit déjeuner : un gros morceau de viande rôtie entre deux tranches de pain. Pier-Luigi est définitivement un fan de viande...

    En fin de journée, j'arrive à Bari, où je prendrai demain le bateau pour la Grèce. Je suis accueilli par Antonella, une doctorante en histoire, une fêtarde, une fille sérieuse et pleine de vie en même temps. Nous marchons dans la vieille ville à la nuit tombante, Bari est vraiment jolie, ses rues piétonnes très étroites forment un labyrinthe dans lequel se perdre n'est qu'un plaisir.

    Nous mangeons une glace devant un immense chateau tout carré (voir quelques photos sur Google images). Ce n'est pas une "glace à l'italienne" comme on en mange en France, mais peut-être la meilleure que j'aie jamais mangée ! Nous discutons en continuant de nous promener, puis rentrons aux alentours de minuit.

     

    Jour 7 : A moi la Grèce !

    Antonella n'aime pas cuisiner, et vu que mon bateau ne part qu'en fin de journée, je me dis que je vais lui préparer quelque chose. Autant choisir ce que j'adore moi-même manger : des crêpes !

    Je fais un nouveau tour dans les environs, seul cette fois, passe par un cyber-café puis fais quelques courses avant de rentrer faire les crêpes. La ville me plaît vraiment, je ne saurais expliquer ça, sûrement parce que je suis du côté de l'ancienne ville. Ca sent le sud. Finalement, c'est dommage que je m'arrête là, juste quand l'Italie commence à avoir du charme. La prochaine fois, je commencerai à Bari, je ferai tout le sud, et puis j'en profiterai pour remonter vers la Corse, que je ne connais toujours pas. Tout ça sonne bien... Je vous dirai !

    J'embarque en fin d'après-midi pour Patras, où un couchsurfer grec très sympa m'accueille. Le lendemain au soir, me revoilà à Mytilène pour quelques mois de bonus...


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  • L'arobase majuscule

     

    Instrumentale : 

     

    Couplet 1 :

    L'Homme est ce savant fou que l'on rencontre au cinéma / 

    Qui fabrique une créature si puissante et si géniale / 

    Qu'elle échappe à son contrôle, et puis l'démembre / 

    Cette créature c'est la société, évidemment /

    Qui nous bouffe la tête, décapitalisme / 

    Qui dévalise la vie par des mécanismes habiles / 

    Ca t'écrase dès qu't'arrives à ce que les faibles appellent la vie /

    Schémas établis qu'un système acerbe abrite /

    Maintenant indéniablement, l'animal a grandi / 

    Et le savant fou constate qu'il n'était qu'un apprenti / 

    En créant son petit monde il avait cru s'affranchir / 

    Il l'a tellement étendu partout qu'il ne peut même pas s'enfuir /

    L'Homme n'est pourtant pas un crétin, agit toujours en réfléchissant /

    Mais c'est un danger certain pour un fou d'être intelligent /

    Et s'il lui manque une case, moi ça ne m'amuse plus /

    Parce que je connais cette case : l'arobase majuscule /

     

    Refrain :

    Système en forme de pyramide comme support de la tyrannie /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Est-ce que l'être humain s'imagine que pour être heureux faut fuir la vie ? /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Arobase majuscule, finis les taggs sur les murs /

    Faut les faire sauter sans discours /

    Arobase majuscule, c'est plus les bombes de peinture /

    Ce serait plutôt les bombes tout court /

     

    Couplet 2 :

    C'est quand même un monde ! Ou plutôt ça ne l'est plus vraiment / 

    C'est à se demander comment on va faire pour trouver encore plus dément / 

    Tenez-vous bien, on en est à désirer avoir des maîtres / 

    Dont le rôle réside d'ailleurs dans le nom : nous la mettre /

    On surproduit des choses futiles en programmant leur défaillance /

    Et le blaireau moyen se paie un I-phone plutôt que des vacances /

    Oh, mais voilà le temps de vie du joujou qui finit /

    Pile au moment de la sortie du modèle qui suit ! /

    C'est l'accumulation de choses comme ça qui nous détient / 

    C'est ça qui nous fait travailler jusqu'à ne plus avoir le temps de rien / 

    On claque un SMIC dans un ordi qui cramera dans les 5 ans / 

    Et pour pouvoir payer le prochain on continue le taff à plein temps /

    Pendant ce temps les hommes d'en haut nous parlent de la valeur travail / 

    Parce qu'en plus faudrait qu'on aime ça, voilà une de leurs meilleures trouvailles / 

    Et le blaireau, il marche à fond, fier d'être un travailleur sans failles / 

    Monsieur France qui se lève tôt pour se faire piner jusqu'aux entrailles /

     

    Refrain :

    Système en forme de pyramide comme support de la tyrannie /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Est-ce que l'être humain s'imagine que pour être heureux faut fuir la vie ? /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Arobase majuscule, finis les taggs sur les murs /

    Faut les faire sauter sans discours /

    Arobase majuscule, c'est plus les bombes de peinture /

    Ce serait plutôt les bombes tout court /

     

    Couplet 3 :

    Kash Prex, arobase majuscule, vie, point, ailleurs / 

    C'est mon adresse, pas grand monde qui m'y écrit, par malheur / 

    Paraît que l'arobase majuscule n'inspire que la peur / 

    Parfait, quel représentant pourrait donc être pire qu'un rappeur ? /

    C'est vrai que si on suit mes fantasmes on va rapidement tout cramer / 

    Moi je n'ai plus peur de faire peur et encore moins d'outrager /

    Comprenez bien : on n'en est plus à la demande de pourparlers / 

    Egorger tous ces fils de putes ne pourrait que nous soulager /

    Oups, je choque ? C'est vrai que j'aurais pu m'douter / 

    La population n'est pas prête, elle aime bien trop se faire culbuter / 

    Tellement habituée à ça que le moindre refus peut choquer / 

    Sûr que si je brûlais l'Elysée on viendrait encore me le reprocher ! /

    Tu vois un peu le délire, c'est du masochisme / 

    Ils prétendent que l'arobase n'est que la loi du plus fort / 

    Mais justement cette loi du plus fort est à son paroxysme / 

    Dans ce monde où plutôt que de te battre, les dirigeants t'endorment /

     

    Refrain :

    Système en forme de pyramide comme support de la tyrannie /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Est-ce que l'être humain s'imagine que pour être heureux faut fuir la vie ? /

    Arobase en lettre capitale, mon seul capitalisme /

    Arobase majuscule, finis les taggs sur les murs /

    Faut les faire sauter sans discours /

    Arobase majuscule, c'est plus les bombes de peinture /

    Ce serait plutôt les bombes tout court /


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  • Tout d'abord, non, cet article ne traite pas d'homosexualité. Ca, c'est fait.

    Encore que la manière dont s'y prennent les Grecs en amour pourrait bien susciter quelques envies de retourner sa veste (et de se faire retourner le reste). Bon.

    En France, on a le "suis-moi, je te fuis, fuis-moi, je te suis". J'avoue qu'avant la Grèce je m'en plaignais, je trouvais ça superficiel, faux, manipulateur, égoïste etc. Beaucoup d'adjectifs, et pas les plus envoûtants. Maintenant, je trouve ça sympa, au moins on sait à peu près comment ça fonctionne, et puis ça reste gentillet.

    En Grèce, je ne sais pas s'ils ont une phrase pour dire ça, mais elle pourrait ressembler à : "fuis-moi, je te fuis aussi, tu finiras par arrêter". Si tu apprécies une fille, tu es bien souvent complètement bloqué. Si tu vas lui parler, elle te fait courir, si tu n'y vas pas, elle attend. Si tu tardes un peu, elle te rappelle sa présence en venant danser près de toi jusqu'à ce que tu la regardes, puis elle repart. Alors tu essaies des choses, la méthode directe, l'indifférence, un va-et-vient entre les deux, toutes sortes de dosages expérimentaux. Tu obtiens des sourires, mais ils veulent tout dire et son contraire.

    Je crois que quand une Grecque te trouve beau, elle pense que toutes les autres filles te trouvent beau aussi. Du coup, tu entres automatiquement dans la catégorie du playboy briseur de coeurs, ou un truc comme ça. Tu n'as encore pas dit un mot, pas esquissé un regard, mais tu es déjà foutu... Tu es le mec de qui il faut se méfier. Peut-être serait-ce plus facile avec une fille qui ne t'a même pas remarqué, qui te trouve "bof", qui accepte tout juste de te parler parce que tu n'as pas l'air méchant ?

    Au bout d'un moment, tu tombes sur une fille avec qui tout se passe très bien. Ca arrive quand même. Vous vous entendez bien, vous passez de bons moments, vous vous rapprochez sérieusement. Vous restez 5-6 mois ensemble, puis elle vous dit : "je t'aime, mais c'est impossible pour moi d'être en couple, alors je te quitte".

    Excellente occasion de goûter les alcools locaux, raki, ouzo, vin de Limnos, whisky de chez Lidl. Grand accès de temps libre pour regarder la mer, composer des textes sur la météo de novembre, écouter l'album Varsovie de Saez. Tant d'activités qui te manquaient.

    Je ne suis plus étonné de la réputation romantico-érotique attribuée aux Français. Explorer l'alternative m'a fait comprendre. Que les choses soient claires, j'adore les Grecs, leur culture, leur Mytilène. Mais qu'ils se marient entre eux, et tout le monde sera content !

    Maintenant je vous le dis, femmes françaises, vous me les brisez parfois, mais je vous aime !


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  • Je ne vous ai pas écrit grand chose ces derniers temps, je sais. En fait, je n'ai pas vadrouillé autant que je l'aurais voulu depuis plusieurs mois. Cet état de faits est dû d'une part à ma situation financière : je ne suis plus étudiant cette année mais prof de français en cours particuliers, ce qui veut dire concrètement qu'aux bourses du CROUS se sont substitués quelques maigres salaires irréguliers. D'autre part, mon immobilité s'explique par une entorse de la cheville (avec quelques complications), qui m'a forcé à ravaler mes envies d'Ikaria ou autres îles grecques plus attirantes les unes que les autres pendant plusieurs mois.

     

    Retour aux bonnes habitudes

    Bref, me revoilà. Non pas que ma cheville soit complètement rétablie, ni que de l'argent me soit tombé du ciel, mais il arrive un moment où l'on fait avec les moyens du bord. J'ai été invité à rapper au festival hip-hop de Kavala, le même auquel j'avais déjà participé l'année dernière (sauf qu'il était cette fois en hommage à un des membres du collectif décédé cette année, très jeune, d'un cancer).

    Je ne pouvais évidemment pas refuser ça, d'abord parce que de manière générale je ne me vois pas refuser une scène, quelle qu'elle soit, mais surtout parce que de me balader un peu me manquait terriblement.

    Après une nuit de bateau, je débarque donc à Καβάλα avec Anna où nous rejoignons Liakos. Nous avons pris l'habitude de rapper ensemble depuis plusieurs mois, sous le nom de "Chaussettes différentes" (en français dans le texte !). Nous sommes 5 dans le groupe, mais seuls Liakos, Anna et moi avons été en mesure de faire le déplacement cette fois.

     

    Le festival n'est qu'après-demain. Nous passons deux jours à nous promener, à nous baigner, à répéter quelques textes.

     Cap vers le nord 1/2 : Le festival hip-hop de Kavala

     

    Liakos est originaire d'ici, il est hébergé par son père. Pour ma part, je suis déjà passé plusieurs fois par Kavala et je me sais le bienvenu dans le squat de la ville. Vous vous souvenez de ce squat ? Celui dont je vous avais parlé ici : http://mitilini.eklablog.com/vadrouille-dans-le-nord-de-la-grece-3-3-a42366744 ? Maintenant, ce sont des amis, j'y vais même avec Anna qui y trouvera aussi un lit.

     

    Le festival

    Le samedi après-midi, nous arrivons sur les lieux du festival, l'équivalent de ce qu'on appellerait en France un IUT (Institut Universitaire Technologique), disons une fac pour simplifier.

    Mauvaise nouvelle : on nous a placés en ouverture des concerts, soit à 18h. Nous sommes un peu déçus, mais tant pis, ça ne nous empêchera pas d'apprécier et de donner ce qu'on a !

    Dès mon arrivée, je tombe nez à nez avec Vasso, une de mes élèves à Mytilène qui est de passage par ici et a décidé d'assister au festival. Première coïncidence d'une petite série que vous n'imaginez pas encore...

    ... Première coïncidence, pas exactement. Il y a quelques semaines, j'ai découvert par hasard sur la page internet du festival qu'un certain "One sec before the end" figurait également sur la liste des rappeurs... One sec before the end, ça vous dit quelque chose ?

    Ou ici avec les paroles en dessous : http://snd.sc/10OYhP3

    C'est le premier Grec avec qui j'ai fait un featuring ! C'était à Thessalonique, il y a plus d'un an. Du coup je l'ai contacté pour lui dire que je serais à Kavala aussi, et bien sûr nous y chanterons notre morceau commun.

    Après Vasso, je le retrouve d'ailleurs assez rapidement, ainsi que quelques personnes que je connais d'ici-même, un an plus tôt. De discussions en verres de vin en spectacle de breakdance, la soirée arrive et les concerts commencent.

    Les concerts sont très bons, avec des groupes venant de divers endroits, dont des amis de ce Litteral X décédé il y a quelques mois. Parmi eux, le groupe antifasciste français La Fibre, dont j'ai déjà croisé le nom sur internet, et que je reverrai peut-être en septembre.

    Après mon passage sur scène, je regarde le groupe suivant quand un type s'approche de moi et commence à me parler en français. Il est suisse, a apprécié ma prestation et veut me mettre en contact avec un certain Monsieur Connard, apparemment un bon beatmaker. Je lui donne mon adresse mail, on verra bien !

    Nous rentrons au squat au petit matin.

     

    J'avais pas compris la leçon

    Après quelques heures de repos, je me lève, descends m'asseoir dehors où quelques personnes discutent déjà, dont Anna. Liakos nous rejoint peu après et nous discutons du retour à Mytilène. Si nous prenons le bateau ici, nous devons attendre jusqu'à mercredi soir, ce qui fait un peu loin. Il y a en revanche un départ de Thessalonique demain à 15h. Liakos nous explique qu'il va partir aujourd'hui en bus et dormir chez sa tante. Je dis que j'irais bien à Thessalonique dès aujourd'hui, moi aussi. Anna dit qu'elle n'a pas d'argent pour le bus... Je dis que je ne comptais de toute façon pas prendre le bus...

     

    Vous souvenez-vous de la galère qu'a été l'autostop lorsqu'il y a un peu plus d'un, j'avais voulu faire Thessalonique-Serres-Kavala ? Je vous l'ai raconté ici : http://mitilini.eklablog.com/vadrouille-dans-le-nord-de-la-grece-2-3-a41632747

    Et bien je suis assez insouciant pour m'y lancer de nouveau ! Je me dis : je suis avec une fille, ça marchera mieux.

    Il est environ 16h30 et nous marchons vers la sortie de la ville. Postés à un bon emplacement, nous attendons une demi-heure pour qu'une voiture s'arrête : un petit vieux très gentil, mais qui ne va qu'à l'hôpital, soit quelques kilomètres plus loin. Pour nous, il pousse un petit peu plus loin et nous pose sur la bretelle d'entrée de quelque chose qui ressemble à une autoroute. Sympa. De là, encore une bonne heure d'attente, puis une drôle de grosse voiture orange s'arrête. Ce sont deux types qui vont à la plage à proximité du prochain village. Quelques kilomètres de plus, ce n'est jamais de refus ! Le problème c'est que les deux baigneurs nous laissent à une sortie de l'espèce d'autoroute, et là, difficile de trouver un emplacement. Une sortie d'autoroute, sûrement le dernier endroit que je choisirais. Nous nous plaçons donc tout simplement sur le bord de la route, à la fin d'une ligne droite pour être bien visibles, mais conscients que les voitures roulent vite et que nos chances sont faibles (je veux dire : encore plus qu'avant)...

    Une grosse demi-heure plus tard, une voiture s'arrête, mais pas franchement celle attendue : la police. Ce qu'on est en train de faire est dangereux etc. Bon, ils font leur travail. Ils nous prennent et nous emmènent à une station de repos où la fréquence de passage dans le sens de Thessalonique doit être d'une voiture toutes les 3 minutes. Sûrement que ces policiers-là étaient de bonne foi et voulaient faire les choses bien, mais pour le coup, c'était difficile de nous mettre en plus mauvaise situation que celle-là. Avec un trafic normal, on n'y arrive déjà pas ! Alors là...

    Nous essayons néanmoins, mais ne sommes pas surpris d'être perpétuellement ignorés, comme souvent. Nous nous imaginons camper par ici, dans un champ, mais celà ne ferait que repousser le problème à demain matin... Une petite heure plus tard, un bus Alexandroupoli-Thessalonique s'arrête à la station. C'est peut-être notre chance. Nous trouvons le chauffeur et lui demandons si, exceptionnellement, il ne prendrait pas en cours de route 2 voyageurs égarés là... Le type répond d'abord qu'il n'est pas censé faire ce genre de choses. Mais cela m'aurait étonné qu'un Grec s'arrête à cette idée-là ! Ici, le "ce qu'on est censé faire" n'a pas la moitié du charisme d'un "ce que j'ai envie de faire". Il nous prend pour 7,50€ chacun.

    Nous arrivons à Thessalonique à 21h30, soit exactement en même temps que Liakos, très surpris de nous trouver à la station de bus. Tu as payé combien ? 10€. Bon, 2,50€ d'économies, soyons-en fiers !

    Direction le centre de Thessalonique.


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  • Καμάρα (Kamara)

    Kamara est plus ou moins le lieu central de Thessalonique. Juste en face, les étudiants viennent s'asseoir, discuter, boire une bière. Liakos passe chez sa tante qui habite tout près, Anna et moi l'attendons ici.

    Je décide d'aller chercher 2 parts de pizza à 0,80€ pièce (avec les prix de Thessalonique, on ne dit pas non), Anna garde les sacs. La dernière fois que je suis venu à Thessalonique, je vous ai raconté comment je suis tombé sur Christos, un ami de Mytilène, totalement par hasard dans une soirée. Cette fois, je vois une fille courir vers moi en disant "Jérémie" ! J'ouvre de grands yeux incrédules. Liza ! Une autre amie de Mytilène ! Elle est déjà apparue dans ce  blog à l'occasion de ma virée en Crète. Thessalonique, c'est quand même la 2ème plus grande ville de Grèce, comment est-ce possible que j'y croise un ami de Mytilène à chaque venue ?! Bref, nous discutons un peu, je fais la connaissance de Manos, l'ami de Liza chez qui elle est hébergée ici. Je vais chercher mes parts de pizza puis nous rejoignons Anna. Liza était en voyage en Espagne et au Portugal, elle a atterri à Thessalonique et prend le bateau pour Mytilène demain, comme Anna, Liakos et moi. Et Vasso, que j'ai vue à Kavala.

    Manos nous parle d'un concert de rap dans un bar, je dis que ça m'intéresse. Liakos, lui, veut aller avec sa soeur et d'autres amis dans un bar réputé pour son vin. Nous décidons donc de nous séparer, direction le concert de rap. Nous nous retrouverons plus tard, ou au pire au port demain.

    Sur le chemin, un type hèle Liza. Elle s'arrête pour lui parler 2 minutes puis m'explique en repartant qu'il s'agit d'un ami qu'elle connaît de Lisbonne, où ils ont été hébergés par la même personne... Encore un hasard assez fou. Thessalonique, terre de coïncidences !

     

    On remet ça ?

    Mais ce n'est pas tout. Nous arrivons dans le fameux bar, et qu'est-ce que je m'aperçois-je (comme dirait Coluche) ? Le rappeur qui tient le microphone est l'un des 2 rappeurs du groupe italien de la veille à Kavala ! J'explore du regard le reste du bar : l'autre Italien, le groupe français, l'Espagnol, l'Américaine, quelques rappeurs grecs, ils étaient une dizaine à s'être retrouvés là pour un open mic (c'est-à-dire que les instrumentales s'enchaînent et n'importe qui peut prendre le micro à tout moment). Je suis étourdi par un pareil coup du hasard, un de plus. Ils ont dû venir à Thessalonique pour la même raison que moi : prendre l'avion (pour moi c'est le bateau) demain pour rentrer chez eux. Qu'on se retrouve dans la même ville, ça fait déjà sourire, mais dans le même bar...

    Bref, je prends évidemment le micro à 2 ou 3 reprises, j'applaudis les autres, on se refait le festival d'hier, 150 kilomètres plus loin. Je discute avec un rappeur de La Fibre, le groupe français. Ils viennent de Millau et sont proches du Collectif Mary Read, assez emblématique du rap antifasciste français. Je garde contact et nous nous reverrons peut-être en septembre à l'occasion d'un festival qu'ils organisent.

    Je discute aussi avec la rappeuse américaine. Elle vient de San Francisco et habite dans un squat à Milan. Elle me raconte comme l'Europe est pour elle un véritable bol d'air. Là d'où elle vient (géographiquement et socialement), on travaille tous les jours sans vacances, on ne sait pas ce qu'est une aide sociale, on ne sait même pas que ça existe ailleurs. On n'a d'échappatoire pour rien, et notamment, l'idée d'occuper un endroit inutilisé pour en faire un squat relève de la fable. Là d'où elle vient, on ne vit pas, on subit tout parce que c'est la condition de survie. Je me demande si l'Europe se dirige vers cette déchéance-là aussi. Sûrement que certaines personnes y èrent déjà. Elle, elle s'est évadée. C'est peut-être facile à dire, mais c'est ce que j'essaierai(s) de faire aussi, sûr.

    La soirée se termine tranquillement, Manos (l'ami de Liza) nous héberge (Anna et moi).

     

    Voilà

    Ce fut bref mais très ressourçant. Bonne musique, bonnes rencontres, bons moments, et toutes ces coïncidences, à Kavala comme à Thessalonique. Le bateau part à 15h et arrive demain à 6h du matin. Nous achetons à manger pour tout ce temps (un énorme sandwich pour au moins 1 repas et demi + une bonne part de pizza : 3€) puis arrivons au port. Là, nous tombons sur Klairi, une autre connaissance de Mytilène, accompagnée d'un type que je ne connais que de visage. Ils feront le trajet avec nous. Dans le bateau, j'écris un peu, je lis, on discute. Quelques heures plus tard, alors que le soleil descend et que la mer est d'un beau bleu pur, des dauphins  saluent notre passage avec grâce. Je n'avais pas d'appareil photo, alors j'en prends une sur internet ; ça ressemblait à ça, avec le coucher de soleil en plus...

    Cap vers le nord 2/2 : Thessaloniki, terre de coïncidences


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